L’effet Benjamin Franklin
1. L’effet Benjamin Franklin désigne cette réaction a priori étrange qui nous fait davantage apprécier une personne dès lors que nous lui avons rendu un service, même si, à l’origine, nous ne l’aimions pas particulièrement (voire pas du tout). On pourrait s’attendre à la réaction inverse.
2. Ce phénomène psychologique a été présenté pour la première fois par Benjamin Franklin (1706 - 1790), écrivain, inventeur du paratonnerre, signataire de la Déclaration d’Indépendance et de la Constitution américaine… en autres. Dans un exemple célèbre, il explique comment il a transformé l’un de ses opposants en allié simplement en lui demandant une faveur, à savoir de lui prêter un livre rare qu’il souhaitait découvrir. L’opposant, probablement flatté, non seulement lui prêta ce livre mais devint l’un de ses amis.
“Celui qui vous a déjà fait une faveur sera plus à même de vous en faire une autre que celui que vous avez obligé à agir.”
Benjamin Franklin
3. Comment un tel miracle est-il possible ? Lorsque nous faisons quelque chose de gentil pour quelqu’un que nous n’apprécions guère, notre cerveau détecte la contradiction entre nos actes et nos pensées (dissonance cognitive), ce qui nous met mal à l’aise. Inconsciemment, nous modifions nos sentiments pour qu’ils soient en cohérence avec notre comportement : nous commençons donc à apprécier cette personne. Ouf, sauvés ! Ce processus est ensuite renforcé par le biais d’engagement (ou escalade d'engagement) qui nous fait persister dans nos comportements, qu’ils soient positifs ou négatifs, afin de ne pas nous renier.
Once people make a decision, take a stand or perform an action, they will face an interpersonal pressure to behave in a consistent manner with what they have said or done previously.
4. Ce phénomène peut permettre de créer un cercle vertueux à l’échelle individuelle ou collective : des actes de gentillesse, même minimes, peuvent générer une dynamique positive, en contribuant à établir de nouvelles relations ou à les rendre plus harmonieuses. Il peut même devenir un outil de résolution de conflits.
5. L’effet Benjamin Franklin peut également être utilisé par des organisations ou entreprises. En nous demandant une faveur - notre feedback sur leurs prestations, un sondage sur les prochains sujets à traiter, le nouveau produit dont nous aurions besoin, etc. - elles augmentent notre engagement et notre fidélité car nous leur avons fait une faveur et nous les apprécions donc davantage.
6. Le plus étonnant ? Selon l’étude de Jon Jecker et David Landy (1969), nous préférons, à circonstances égales, quelqu’un qui nous a demandé un service, à quelqu’un qui ne nous a rien demandé. En revanche, nous n’aimons pas du tout qu’une personne passe par un intermédiaire pour nous demander une faveur. Froncements de sourcils garantis.
7. Il faut bien avouer qu’il s’agit potentiellement d’une méthode de manipulation, certes subtile mais quand même… Vous pouvez tenter de vous faire apprécier d’une personne qui ne vous aime pas, en lui demandant de vous rendre service. A l’inverse, vous pouvez réfléchir au véritable objectif de la personne qui vous demande une faveur : a-t-elle véritablement besoin d’aide ou cherche-t-elle avant tout à se faire apprécier ?
La leçon à retenir
Et s’il s’agissait aussi d’une forme de flatterie ? “Pourrais-tu m’aider, toi qui es si intelligent, compétent, gentil, altruiste, riche, etc. ?”. Notre égo en est tout ragaillardi et nous sommes reconnaissants à cette personne si clairvoyante de nous avoir donné ce bref moment de satisfaction.
Pour aller plus loin
Le décollage de l’économie de basse altitude
1. L’économie de basse altitude désigne les services civils utilisant des drones de livraison, des taxis volants, des hélicoptères de loisirs et demain peut-être des cargos de livraison ou des vols passagers basse altitude.
2. Rien que pour la Chine, cette économie devrait atteindre 700 milliards de dollars d’ici 2025 (source : The South Morning China Post), notamment grâce aux drones de livraison qui devraient s’imposer rapidement dans les grandes villes.
3. Pourtant, ces services ont connu des débuts poussifs. Dès 2013, Jeff Bezos, fondateur d’Amazon, pariait sur la livraison par drone mais l’échec fût cuisant en raison des difficultés accumulées. Outre des capacités limitées (un drone ne pouvait transporter qu’un colis de moins de 2 kilos à la fois), ces vols n’étaient autorisés que s’ils étaient surveillés par un observateur, sans compter que la livraison devait obligatoirement se faire en mains propres. Décollage raté. Un comble…
4. Mais tout pourrait changer dès 2024 car les autorités chinoises ont fait de cette économie une priorité nationale. Capitale de la technologie chinoise, Shenzhen est devenue une ville pilote, avec plus de 80 000 colis livrés par drone en 2023, 70 points de décollage et d’atterrissage, et 74 nouvelles routes de drones. Grâce à ses 1 500 entreprises spécialisées dans la filière du drone, Shenzhen se rêve en capitale de l’économie de basse altitude. Avec déjà 70 % du marché mondial des drones (source : Aviation Industry Corporation of China), la Chine compte bien en profiter pour renforcer sa position de leader international dans ce secteur.
5. Le vol retour d’Amazon... Côté Etats-Unis, Amazon redevient très ambitieux. Avec son programme Prime Air, le géant du e-commerce souhaite effectuer par drone plus de 500 millions de livraisons par an d’ici 2030. Pour se relancer, Amazon compte sur son nouveau drone, le MK30, plus petit, plus silencieux et capable de transporter des colis de 7 kilos. De nouveaux sites de livraison par drone vont venir renforcer, dès fin 2024, le réseau actuel de livraison par camion, notamment au Royaume-Uni et en Italie. Dans son sillage, d’autres acteurs tentent de profiter de ce décollage :
Zipline, spécialiste américain des drones destinés à la logistique (centres médicaux, restaurants, distribution…), revendique plus de 100 millions de kilomètres de vols autonomes.
Wing (filiale d’Alphabet, maison mère de Google), également spécialisé dans la logistique, aurait déjà livré par drone plus de 350 000 commandes (majoritairement en Australie).
"If our experience tells us anything, it's that people go from science fiction to entitlement in seven days. For seven days, it's pure magic. Then on day eight, they're looking at their watch and saying, 'You're 30 seconds late."
Keller Renaudo Cliffton, Président de Zipline
6. Les livraisons par drone impactent également le secteur médical, puisqu’elles pourraient permettre d’envoyer du matériel en urgence dans des régions isolées et difficiles d’accès, et donc de sauver des vies. Le néerlandais Avy est déjà un acteur clef de ce domaine.
7. Si l’économie de basse altitude décolle enfin et ouvre de nombreuses perspectives, c’est qu’elle possède des avantages conséquents :
La rapidité : dans un rayon de 3 kilomètres, une livraison s’effectue en 15 minutes par drone contre 30 minutes par la route.
Le gain écologique : 100 % électriques, les drones permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
L’urbanisme : l’extension des infrastructures routières devrait être limitée dans les grandes villes.
La leçon à retenir
Dans quelques années, il n’est pas exclu que nos enfants nous demandent : “mais comment vous faisiez quand il n’y avait pas de drones ?”.