L’expérience de Ash
1. L’expérience de Ash démontre combien la pression du groupe social dans lequel nous évoluons peut influencer ce que nous pensons ainsi que notre comportement. Son objectif principal était de comprendre comment et pourquoi nous avons tendance à nous conformer aux opinions majoritaires, même si elles sont manifestement fausses.
2. Cette expérience a été réalisée en 1951 par Solomon Asch, psychologue d'inspiration gestaltiste polonais émigré en 1920 aux États-Unis, pionnier de la psychologie sociale. Pas sûr qu’il aurait l’autorisation d’entrer aux Etats-Unis de nos jours…
3. L’expérience en elle-même est assez simple. Un groupe de participants dont un seul d’entre eux était “naïf”, les autres étant des comédiens “complices”, devait comparer la longueur de lignes imprimées sur des cartes et identifier celle qui correspond à une ligne modèle. Les “complices” donnent d’abord des réponses correctes, puis des réponses incorrectes de manière unanime, mettant ainsi le sujet “naïf” dans une situation de pression sociale. Et ce qui devait arriver arriva…
4. Alors que les réponses correctes étaient évidentes, 36,8 % des sujets “naïf”s se sont conformés aux réponses manifestement fausses du groupe, tandis que 75 % se sont conformés au moins une fois.
5. Ce conformisme est d’autant plus fort que le groupe est large (à partir de 3 personnes), unanime, et présentant une forte cohésion. La présence ne serait-ce que d’un seul allié donnant la réponse correcte, réduit significativement cet effet.
6. Plusieurs mécanismes psychologiques peuvent expliquer notre réaction :
L’influence normative (ou distorsion de l’action) : nous nous conformons car nous voulons nous intégrer au groupe et ne pas être rejetés.
L’influence informationnelle (ou distorsion du jugement) : nous “suivons” le groupe car nous croyons qu’il détient des connaissances ou informations que nous n’avons pas.
La conformité interne (ou distorsion de la perception) : nous finissons par véritablement croire les opinions exprimées par le groupe, ce qui nous conduit à modifier nos propres idées et perceptions initiales.
7. Si l’effet Ash est bien connu dans le domaine du management et de la vie professionnelle, il serait intéressant de l’étudier dans le contexte des réseaux sociaux… où le rejet peut être immédiat et brutal.
La leçon à retenir
Pas si facile de maintenir notre indépendance face à un groupe unanime… Mais on peut toujours essayer de prendre du recul, de réfléchir et de “résister”. Qui sait ? Nous ne serons peut-être pas les seuls finalement…
Pour aller plus loin
Geospy
1. Lancée en 2024, Geospy est une application de géolocalisation utilisant l’intelligence artificielle pour identifier sur la base de la végétation ou des bâtiments alentour, l’emplacement exact, à quelques mètres près, où une vidéo ou une photo a été prise, et ce n’importe où dans le monde, en quelques secondes bien sûr.
2. Geospy a été développé par Graylark Technologies, une start up américaine fondée par Daniel Heinen à Boston en 2022. Elle ne compterait pas plus d’une dizaine d’employés.
3. Le succès a été fulgurant. Dès son premier mois d’activité, Geospy a traité plus de 200 000 images et vidéos par jour, en provenance de plus de 100 pays.
4. Cette application peut être utilisée dans des buts positifs : organisation de secours, recherche de personnes disparues, enquêtes policières… comme négatifs, voire carrément néfastes : harcèlement, “espionnage” d’un conjoint… Elle représente d’autant plus une menace pour la vie privée qu’aucune expertise n’est nécessaire pour utiliser ses capacités de repérage, entraînées sur la base de 46 millions d'images. Une simple photo postée sur Instagram, et vous savez exactement où se trouve la personne…
5. Face à ces risques de dérive, Geospy a décidé en janvier 2025 de fermer son accès au grand public, et de réserver ses services aux forces de l’ordre et aux pouvoirs publics.
6. Geospy s’inscrit dans l'essor des renseignements dits de sources ouvertes (Open Source Intelligence ou OSINT en anglais) car obtenus à partir de données publiques, disponibles sur Internet. Avec des outils aussi simples et puissants que Geospy, plus besoin d’être formé aux techniques d’analyse d’image pour s’adonner à l’espionnage…
7. Si cette lecture vous a rendu légèrement parano, voici quelques conseils pour éviter de vous faire repérer par des services de “geoguessing” comme Geospy :
Lorsque vous faites des images en intérieur, évitez de montrer l’extérieur de la maison ou de l’appartement où vous vous trouvez.
Lorsque vous faites des photos / vidéos en extérieur, vérifiez que les arrière-plans ne comportent pas d’indices identifiables.
Avant publication sur les réseaux sociaux, supprimez les informations techniques cachées dans vos photos ou vidéos car elles peuvent contenir des coordonnées GPS.
Enfin, plus généralement, activez les paramètres de confidentialité des réseaux sociaux que vous utilisez, afin de limiter l’accès à vos publications.
La leçon à tirer
“Pour vivre heureux, vivons cachés.”
Pour aller plus loin
Graylark closes public access to AI tool for geolocation, Heise Online
La démo de Geospy en vidéo - Graylark Technologies
Jouez à Goeguessr