7 about... la courbe de Gartner, OnDeck et “l’aquoibonisme” à la chinoise
Au-delà de la hype, la courbe Gartner
Le Hype Cycle de Gartner explique comment une innovation se diffuse. Ou non...
Chaque année, le cabinet Gartner publie une centaine d’études sur l’évolution des technologies, tendances et marchés de différents secteurs. Le plus célèbre de ses travaux - le “Hype Cycle” - est une courbe représentant les 5 phases d'adoption d’une nouvelle technologie.
Au début, dans les phases de lancement (technology trigger) et d’attentes disproportionnées (peak of inflated expectations), on croit à fond à la technologie qui vient d’apparaître. Les médias s’emballent. On investit, plein d’espoir. A tort car la technologie n’en est qu’au stade du prototype.
Vient ensuite la phase des illusions perdues (trough of disillusionment). La technologie n’a pas rencontré son marché (que pouvait-on espérer d’un prototype ?). Cette fois, ce sont les échecs et les revers financiers qui font la Une. On passe à l'anti-hype alors qu’en parallèle les produits mûrissent en silence.
Arrivent alors les phases de retour à la raison (slope of enlightenment) et de productivité (plateau of productivity). Au moment où plus personne n’y croit et à force de persévérance, certaines innovations finissent par rencontrer leur marché. Largement adoptée, cette technologie se banalise et devient un produit de la vie courante.
Le “Hype Cycle” met en lumière les écarts entre exposition médiatique et adoption d’une nouvelle technologie, tout en soulignant nos erreurs de jugement liées au biais de disponibilité (plus nous sommes exposés à une information, plus nous y croyons) et à la pression de groupe. Il s’agit de savoir évaluer les opportunités : ne pas miser sur une technologie immature, profiter de l’anti-hype, ne pas laisser passer une technologie parce qu’elle ne fait plus de bruit...
ClubHouse, dernier exemple en date... Après avoir été en début d’année the place to be, ClubHouse est désormais considéré comme has-been. En quelques mois, l’application audio est passée de l’attente démesurée auxillusions perdues. Selon le “Hype Cycle”, il devrait remonter la pente et s’installer dans le paysage. D’ailleurs la concurrence sur les services audio fait rage, avec l’arrivée de Twitter et de Facebook sur ce créneau.
Le “Hype cycle” n’est pas un modèle scientifique. Ce n’est pas vraiment un cycle non plus car ces étapes ne se produisent qu’une fois dans la vie d’une technologie. Mais il nous aide à construire notre pensée critique face à l’engouement pour les nouvelles technologies. Ce qui en fait sa valeur unique !
La leçon à retenir
La courbe de la Hype est probablement le meilleur outil pour évaluer le renouvellement continu et de plus en plus rapide des nouvelles technologies. Et pour prendre conscience de nos erreurs de jugement...
Pour aller plus loin
Les tendances technologiques en 2021 de Gartner
On Deck, le phénomène de la formation en ligne
On Deck (beondeck.com) est un site américain de formation en ligne pour les professionnels de la tech (entrepreneurs, business angels, capitaux risqueurs, créateurs de contenus...). Déjà riche d’une cinquantaine de formations, On Deck couvre l’ensemble des compétences digitales, y compris la transformation des entreprises (On Deck Scale).
On Deck, c'est le MBA “à la carte” des compétences non couvertes par les MBA... à des tarifs plus abordables (à partir de 2 000 $ par formation).
On Deck n’est pas une école mais une plateforme “fédérant” :
Des formations pour des cohortes de 100 à 200 élèves, sur 8 à 10 semaines
Des élèves triés sur le volet (seuls 5 à 20 % des candidatures sont retenues)
Des “enseignants” non traditionnels, professionnels expérimentés dans le secteur du digital
Des communautés hyper actives d’anciens élèves (plus de 1 400)
Créé en 2016 sur un concept initial de dîners entre professionnels, On Deck pivote vers la formation selon un modèle hybride “digital / physique” puis, avec la pandémie, 100 % en ligne et donc 100 % mondiale.
On Deck a réussi une prouesse rarissime : être rentable en moins de 4 ans. Un cas d'école, oserait-on dire ! On Deck a multiplié ses revenus par 10 en 2020. Mais, grâce à son modèle de plateforme (un AirBnB de la formation), ses coûts de création de nouveaux programmes pour une cible mondiale restent faibles.
Apprendre, c'est bien. Se constituer un réseau professionnel en même temps, c'est mieux. L'expérience ne se limite pas aux cours. Les programmes multiplient les workshops, rencontres et événements virtuels. L’usage de Slack est omniprésent. Tout est fait pour créer des liens durables, et pourquoi pas, créer une startup... La promesse d'On Deck ne laisse planer aucun doute : "Where ambitious grow together".
Au-delà de la formation, l'enjeu caché du capital d'amorçage. 330 entreprises se sont créées grâce à On Deck, levant plus de 250 millions de dollars de fonds. Ce succès concurrence désormais les incubateurs comme intermédiaires entre talents et investisseurs d'amorçage.
On Deck surfe sur l'énorme vague de l'apprentissage permanent. Nos vies se rallongeant, nos carrières vont s’étendre sur 60 ans, voire 70 ans… alors que nos compétences deviennent de plus en plus vite obsolètes (au bout de 5 ans selon Deloitte). Le marché mondial de l'éducation en ligne devrait atteindre 374 milliards de dollars en 2026 (+ 15 % par an). A l'instar d'On Deck, les acteurs de l'Edutech (Udemy, 360 Learning, Coursera...) ont un boulevard devant eux.
La leçon à retenir
Ne plus se former une fois ses études terminées est une hérésie, d’autant plus qu’apprendre et réseauter en même temps n’a jamais été aussi facile.
Pour aller plus loin
Suivre On Deck et Erik Torenberg (CEO) sur Twitter
Postuler aux programmes de OnDeck
Contacter les On Deck Fellows
Le rapport d'Educapital sur la souveraineté éducative en France
Les besoins d'Education en 2030, selon l'OCDE
Gudetama, l’oeuf fainéant adopté par les millenials asiatiques pour exprimer leur désenchantement
“Sang wenhua” ou “l’aquoibonisme” à la chinoise
En Chine, le “sang wenhua” que l’on pourrait traduire par la culture de la défaite, se répand auprès de certains millennials chinois.
Le “sang wenhua” est une sous-culture fondée sur le pessimisme, le défaitisme et l’apathie. Une forme de résistance passive de la jeunesse…
Cette tendance prend le contre-pied de la culture officielle de l’Energie Positive, prônée par le Président Xi Jinping depuis son arrivée au pouvoir en 2012.
Le “sang wenhua” n’est pas un mouvement de contestation politique, mais plutôt l’expression de la désillusion face à cette injonction de réussite. Ces jeunes Chinois refusent la compétition et n’hésitent plus à afficher leurs échecs, dans l’espoir peut-être d’échapper à ce destin tout tracé.
Enfants uniques, voire petits-enfants uniques, les jeunes Chinois sont soumis dès leur plus jeune âge à une pression angoissante : affronter des parcours scolaires ultra-compétitifs, conclure le meilleur mariage, acheter sa maison à un prix exorbitant…
Une partie de la jeunesse chinoise refuse la glorification du “self-made man” et la règle des 996 (on travaille de 9h du matin à 9h le soir, 6 jours par semaine, soit 72 heures de travail hebdomadaire).
De la même façon, certaines jeunes femmes refusent de se marier car cela implique - après des années d’études exigeantes - de sacrifier sa carrière tout en cumulant travail, tâches ménagères, soins à l’enfant et prise en charge des quatre grands-parents lorsqu’ils deviennent âgés…
Logiquement, on retrouve des signes de “sang wenhua” dans la démographie chinoise. En 2020, le pays a connu la plus faible progression démographique depuis plus de 50 ans, avec près de 14,5 millions de naissances en moins. A ce rythme, la Chine pourrait devenir le recordman mondial de la plus faible natalité et laisser l’Inde devenir la première population mondiale dès 2023.
La leçon à retenir
Revers d’une réussite éclatante, le désenchantement de la jeunesse et la baisse démographique constituent peut-être les plus grandes menaces pour la société chinoise.
Pour aller plus loin
Les chiffres du dernier recensement chinois
L’Aquoiboniste de Jane Birkin (musique et paroles de Serge Gainsbourg)
Merci pour votre attention. Nous vous souhaitons un excellent week-end et vous donnons rendez-vous vendredi prochain ! En attendant, vous pouvez nous retrouver sur Linkedin, Twitter ou Facebook !