🔴 7 about... le "cashless effect", le Rebel Book Club et le tour du monde de la (très lente) décarbonation
Le cashless effect
1. Le cashless effect est un biais cognitif selon lequel nous dépensons plus volontiers notre argent lorsque nous payons de façon abstraite (carte bancaire, paiement en ligne, mobile, etc.) que lorsque nous payons avec des espèces sonnantes et trébuchantes. En effet, il semblerait que nous ressentions un certain chagrin (pain of payment) à nous séparer physiquement de notre argent.
2. Le paiement sans cash facilite l’acte d’achat car il permet d’éviter certains “points de friction” tels que compter notre argent avant de le donner, avoir prévu un nombre suffisant de billets et de pièces se déplacer à la banque ou au distributeur pour retirer de l’argent liquide… Bref, tout obstacle qui nous permettrait de réfléchir, voire de différer ou annuler notre achat.
3. Par ailleurs, cet effet nous incite non seulement à procéder à des achats d’un montant plus élevé mais aussi à accepter de payer plus cher (sans nous en rendre compte) un même produit, dès que nous réglons de façon abstraite.
4. Le cashless effect a fait l’objet d’une première étude en 1979 par Elizabeth Hirschman. Lors d’une enquête menée auprès des clients d’un grand magasin, cette spécialiste du marketing a constaté que les personnes ayant payé par carte avaient procédé à des achats plus importants que ceux ayant réglé en cash.
5. Ces premières constatations ont été confirmées par l’étude de Drazen Prelec et Duncan Simester, professeurs à la MIT Sloan management school : deux groupes de personnes devaient obtenir des tickets pour un événement sportif via un système d’enchères. Le prix proposé par le groupe devant régler par carte était supérieur de 72 % à celui proposé par le groupe devant régler en cash.
6. Eliminer les points de friction constitue donc un enjeu crucial, dans le monde physique comme sur Internet. C’est ce qu'ont très bien compris des acteurs comme Amazon avec son système “Achat en 1 clic” : vous n’avez même plus à (ré)entrer votre numéro de carte bancaire ou vos coordonnées. Un clic et c’est déjà payé / envoyé. Même principe pour les abonnements, prélèvements automatiques… Le “no pain, no gain” devient le “no friction, no pain, more gain” car, plus les paiements sont dématérialisés, plus nous avons tendance à consommer.
7. Selon l’étude SPACE (Study on the Payment Attitudes of Consumers in the Euro area), les espèces restaient, en 2019, le moyen de paiement le plus utilisé (59 %) en France, dans les magasins et entre particuliers (35 % pour les paiements par carte). Toutefois, après la crise sanitaire de 2020, la prochaine étude montrera certainement quelques évolutions notables.
La leçon à retenir
Le cashless effect disparaîtra au fur et à mesure que les espèces disparaîtront. Les jeunes ados ont désormais une carte ou une appli pour régler leurs dépenses quotidiennes. Bientôt, la question sera : “De l’argent liquide ? C’est quoi ?”.
Pour aller plus loin
The Effect of Payment Transparency on Consumption: Quasi-Experiments from the Field - Dilip Soman
Study on the payment attitudes of consumers in the euro area (SPACE)
L’utilisation des espèces en France et dans la zone euro | Banque de France
Le Rebel Book Club
1. Direction Londres ! Le Rebel Book Club est un club de lecture spécialisé dans les essais (non-fiction) mais pas n’importe lesquels : ceux qui vous donneront envie de changer…
2. Le but du Rebel Book Club est non seulement de vous faire lire un essai par mois, mais aussi de vous inciter à en parler et à appliquer les enseignements que vous en aurez retirés.
Reading + learning + doing
3. Sélectionnés par l’équipe et les membres du Club, les thèmes sont liés aux façons de travailler (plus intelligemment), à l’identité, à la fast fashion, aux startups, aux questions de genre, à l’Intelligence Artificielle, etc. Tout ce qui donne à réfléchir en ce moment.
4. Le Club ne vous lâche pas dans la nature. Avec une newsletter et des chats, il vous encourage chaque semaine à poursuivre vos lectures, histoire que vous n’abandonniez pas en si bon chemin.
5. Enfin, vous rencontrez des gens qui ont les mêmes intérêts que vous, la même envie d’apprendre et de “faire”. Chaque mois, lors de réunions physiques ou virtuelles, vous pouvez échanger entre membres et avec les auteurs, sur les livres que vous avez lus. C’est comme ça qu’on apprend le mieux…
LEARNING IS A SUPERPOWER.
6. Ce Club existe depuis mai 2015 ce qui représente 86 livres présentés (comptage du créateur Ben Keene). Si j’avais lu 86 essais contemporains en 7 ans, je serais sûrement devenue belle, riche et intelligente, en tout cas, un petit peu plus intelligente ce qui serait déjà pas si mal… (Eh non, ce n’est pas mission impossible !)
7. Damned, ce n’est pas gratuit ? Comme chez les psys, payer, c’est s’impliquer. Et puis, il faut bien que les gens qui passent leurs journées à organiser tout ça, puissent aussi en vivre… sinon, ils n’auraient pas le temps d’organiser tout ça, et ce serait dommage.
La leçon à retenir
Plutôt enthousiasmant ! Surtout lorsqu’on regarde sa pile d’essais à lire, grandir, grandir… tout en passant ses soirées sur Netflix.
Pour aller plus loin
*** Cela va sans dire mais sait-on jamais… Nous ne percevons aucun avantage ou rémunération de la part des sites dont nous parlons dans “7 about…” ***
Tour du monde de la (très lente) décarbonation
La décarbonation, on en parle beaucoup mais on en fait (pour le moment) assez peu. Nous vous proposons un tour du monde des mix énergétiques pour mieux comprendre les raisons de la très lente décarbonation de la planète. L’essentiel des sources citées provient de l’ouvrage de Vaclav Smil, How the world really works.
1. La décarbonation consiste à réduire la part de la consommation de combustibles fossiles (gaz, pétrole, charbon), émetteurs de gaz à effet de serre. Quelques définitions pour commencer : Energie primaire et énergie finale : les énergies primaires sont celles disponibles dans la nature avant toute transformation (vent, pétrole brut, gaz naturel…). L’énergie finale est celle qui nous est livrée et facturée pour notre consommation (essence à la pompe, électricité à la maison…).Mix énergétique et mix électrique : le mix énergétique est la répartition des différentes sources d’énergies primaires consommées sur une zone géographique donnée. Le mix électrique désigne les sources d'énergie employées pour produire de l’électricité. Distinction importante puisque l’électricité ne représente que 18 % de la consommation mondiale d’énergie.
2. La dépendance mondiale aux énergies fossiles n’a que très peu diminué au cours des 20 dernières années. En effet, le mix énergétique mondial est passé de 87 % d’énergies fossiles en 2000 à 85 % en 2020 ! En 2040, la part des énergies fossiles dans le monde devrait demeurer élevée : entre 72 % et 56 % selon les différents scénarios établis par l’Agence Internationale de l’Energie.
3. Pour mieux comprendre cette (très) lente marche vers la décarbonation, commençons notre tour du monde par l’Allemagne. Depuis 20 ans et grâce à son programme Energiewende, la part du renouvelable dans la production d’électricité du pays a bondi de 11 % en 2000 à 40 % aujourd’hui. Une prouesse mondiale ! Et pourtant, même avec de tels efforts, la part des combustibles fossiles dans le mix énergétique allemand n’a que très peu diminué en 20 ans : 84 % en 2000 contre 78 % aujourd’hui. L’Allemagne est le symbole même de la très lente décarbonation de la planète (hors électricité).
4. Encore plus fort que l’Allemagne, le Danemark produit 80 % de son électricité à partir d’énergies renouvelables et 45 % à partir du seul éolien ! Un résultat exceptionnel obtenu notamment grâce à sa “petite superficie” et à sa forte interconnexion avec les réseaux voisins, suédois et allemand. En cas de besoin, le Danemark peut facilement importer son électricité. Revers de la médaille : le coût de l’électricité danois est le plus élevé d’Europe (source : The Danish Energy Agency).
5. Côté Chine, la décarbonation se fait aussi en pente (très) douce : la part des énergies fossiles dans son mix énergétique représentait 93 % en 2000 et 85 % en 2019. Et l’on ne peut même pas parler de progrès puisqu’au cours de la même période, sa demande en combustibles fossiles a quasiment triplé. Avec une population de 1,4 milliard d’habitants, l’explosion de la demande chinoise explique à elle seule pourquoi la part des énergies fossiles dans le mix énergétique mondial est restée stable.
6. Aux Etats-Unis, champion mondial de la consommation d’énergie par habitant, la part des combustibles fossiles s’élève à 80 % de son mix énergétique. A noter : le pays a largement diminué sa dépendance au charbon pour la production d’électricité, en le remplaçant par du gaz naturel (moins émetteur de gaz à effet de serre).
7. A l’inverse, le Japon recarbonne… Alors que les énergies fossiles représentaient 83 % de son mix énergétique en 2000, ce pourcentage est passé à 90 % en 2019. En cause : le traumatisme de Fukushima provoquant l’arrêt de la production nucléaire et par conséquent l’augmentation des importations d’énergies fossiles (source : The Energy and Modelling Center).
La leçon à tirer
Et la France dans tout ça ? Pas si mal… En 2020, notre consommation d’énergie primaire se répartissait entre 46 % d’énergies fossiles (28 % de pétrole, 16 % de gaz naturel, 2 % de charbon), 40 % de nucléaire et 14 % d’énergies renouvelables et déchets (source : SDES, Bilan énergétique de la France).
Surtout, surtout, de NE PAS parler du nucléaire pendant le repas de Noël…
Pour aller plus loin
What we need to know about the pace of decarbonation, Vaclav Smil
Commitments to Net Zero double in less than an year, Nations Unies
Going Climate-Neutral by 2050, Commission Européenne
The world energy outlook, Agence Internationale de l’Energie
Bilan énergétique de la France | Chiffres clés de l'énergie - Édition 2021
Nous n’allons pas (encore ?) monter notre book club mais, en attendant, voici une recommendation pour tous ceux que ça peut intéresser : l’ouvrage de référence “Innovez avec le design thinking” de Jean-François Marti. On en reparle ?