🔴 7 about... le "feedforward", GPTZero et l’"attention engineering"
L’art du feedforward (vs feedback)
1. Vous connaissez l’exercice du feedback ? Eh bien, le feedforward en est l’exact opposé. Il ne s’agit pas de parler du passé mais du futur.
2. Selon une étude Gallup, seuls 26 % des employés considèrent les feedbacks comme utiles. Qu’ils soient positifs ou négatifs (euh, pardon… constructifs), ces retours sont le plus souvent considérés comme personnels et démotivants, bref, contre-productifs.
3. A l’inverse, le feedforward n’a rien de personnel puisqu'il se concentre sur les nouveaux savoirs ou comportements à acquérir. Évoquer le passé pour évaluer le présent démotive. Se projeter vers l’avenir transmet une énergie positive. Il suffisait d’y penser.
4. L’art du feedforward consiste à évaluer la situation et non la personne. Comme on ne peut pas changer la situation passée, rien ne sert de s’y attarder : mieux vaut chercher à améliorer les situations futures.
5. Nous devons le concept du feedforward à Marshall Goldsmith, coach, manager et auteur américain, connu pour son best-seller What got you here won’t get you there.
6. Les entreprises pratiquant le feedforward constatent un renforcement des relations interpersonnelles entre les collaborateurs, grâce à trois facteurs principaux :
L’élimination des blessures d’égo
L’absence de jugement
Un management en situation de soutien
7. Certes, la pratique du feedforward se heurte à la culture largement répandue du management de contrôle et “d’évaluation descendante”. Toutefois, les entreprises souhaitant évoluer vers un modèle plus décentralisé, autonome et agile, sont amenées à se tourner vers ce mode de management où l’on cesse de dire ce qu’il aurait fallu faire, pour privilégier ce qu’il va falloir faire.
La leçon à tirer
C'est vrai qu'on avance mieux en regardant la route devant soi, qu’en regardant dans le rétroviseur. CQFD.
Pour aller plus loin
Feedback is not enough, Gallup
Le générique de Feedback, l’ex-émission culte de Bernard Lenoir. Ok, rien à voir… Juste un peu de guitare pour le plaisir.
GPTZero, l’antibot qui détecte les plagiats
1. GPTZero est un outil permettant de détecter les textes rédigés par ChatGPT. Utile par les temps qui courent !
2. On ne présente plus ChatGPT, symbole incontesté de l’intelligence artificielle grand public et recordman de la rapidité d’adoption, avec 100 millions d’utilisateurs en deux mois. Cette déferlante a pris de cours le monde de l’éducation, du recrutement, du journalisme, etc.
3. GPTZero a été créé par Edward Tian, 22 ans, étudiant en informatique et en journalisme à l’université de Princeton. Le profil idéal pour s’attaquer à ChatGPT dont il ne cherche pas à contrer l’utilisation mais à en éviter les dérives telles que la désinformation ou le plagiat…
"This technology is incredible. I do believe it's the future. But, at the same time, it's like we're opening Pandora's Box. And we need safeguards to adopt it responsibly.”
Edward Tian
4. GPTZero est très simple d’utilisation. Il suffit de copier-coller le texte ou de télécharger le fichier à analyser. L’outil surligne en jaune les passages suspects.
5. Pour détecter une écriture artificielle, GPTZero analyse la variation de deux critères : la complexité et l’éclatement.
La complexité (perplexity) : plus le texte varie dans son niveau de complexité, plus il est probable qu’il ait été écrit par un humain.
L’éclatement (burstiness) : nous autres, humains, enchaînons des phrases courtes et longues, de façon assez aléatoire. Nous modulons notre écriture, bien plus qu’un robot qui a tendance à écrire des phrases de longueur uniforme.
Écriture uniforme côté Intelligence artificielle, écriture variée côté humain. C’est donc à cela qu’on nous reconnaîtrait ? On se distingue de la machine comme on peut…
6. GPTZero fournit un score de probabilité : à partir d’un score de 0,65 sur 1, il est conseillé de se méfier.
7. Pour le moment, GPTZero est gratuit. Vu le succès, ça risque de ne pas durer…
La leçon à tirer
On peut raisonnablement penser que ChatGPT va améliorer ses scores. Alors qui gagnera la course ? ChatGPT ou GPTZero ?
Pour aller plus loin
GPTZero founder opposes banning the Chatbot in schools, Insider
The college essay is dead, The Atlantic
L’ “attention engineering”
1. L’attention engineering est l’ensemble des techniques psychologiques utilisées pour retenir le plus longtemps possible l’attention d’un utilisateur, dans le but de maximiser les revenus publicitaires ou la collecte de données via un site ou une plate-forme.
2. Ce concept a émergé en 2017 avec l’auto-critique de Chamath Palihapitiya, ancien vice-président de Facebook, lors de son intervention “View from the Top Talk” à l’Université de Stanford. Quoi ! Un ancien de Facebook qui dénonce les méthodes de Facebook ? Il n'en fallait pas plus pour prendre conscience des méfaits de l’attention engineering.
“…we have created tools now that are ripping apart the social fabric of how society works. It is eroding the core foundations of how people behave, by and between each other. And I don't have a good solution. My solution is that I just don't use these tools anymore. I haven't for years."
Chamath Palihapitiya
3. L’attention engineering est devenu central dans l’UX Design (design d’expérience utilisateur), discipline dont l’objectif initial est de rendre intuitif un site ou une application. Car il est facile d’utiliser ce savoir-faire pour concevoir des applications addictives en exploitant nos vulnérabilités psychologiques.
4. Les attention engineers jouent sur notre addiction à la dopamine, ce neurotransmetteur sécrété naturellement par notre cerveau, qui nous procure un sentiment de bien-être, notamment lorsque nous atteignons un “objectif” (finir nos devoirs, être likés, gagner aux jeux de hasard, etc.). Sans surprise, ces techniques s’inspirent des pratiques des casinos.
5. Les réseaux sociaux sont actuellement les plus performants dans ce domaine, grâce à l’utilisation des “récompenses sociales imprévues” (notre post va-t-il nous valoir “un peu, beaucoup, pas du tout” de likes ? Il faut vite aller vérifier…) ou d’algorithmes nous fournissant notre dose (ah, les vidéos de chats !).
6. Heureusement, nous pouvons devenir notre propre attention engineer et reprendre le contrôle. Quelques habitudes toutes simples peuvent contrecarrer les intentions des mastodontes du digital : supprimer les notifications, fixer des limites au temps passé devant les écrans ou tout simplement laisser son téléphone ou sa tablette dans une autre pièce, etc. Des solutions d’une efficacité redoutable !
7. L’attention engineering s’étend désormais à d’autres domaines, dont l’information. Savoir lutter devient crucial. Car ces méthodes ne servent pas qu’à gagner de l’argent, elles servent aussi à gagner de l’influence et du pouvoir. Un cerveau averti en vaut deux.
La leçon à en tirer
L’attention engineering fait le plus gros hold-up du siècle en nous volant notre temps (les journées n’auront jamais plus de 24 heures). Du temps que nous pourrions passer à réfléchir (au secours !), à se parler (hum hum…) ou à aimer (ah, mieux, beaucoup mieux !).
Pour aller plus loin
Le documentaire The Social Dilemma - sélectionné à Sundance 2020
Le livre fondateur : Persuasive Technology: Using Computers to Change What We Think and Do de B.J. Fogg, fondateur du Behavior Design Lab à l’université de Stanford
Le livre salvateur : Dopamine Nation: Finding Balance in the Age of Indulgence: Lembke, Dr. Anna
Le livre pour se désintoxiquer : Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital - Moins de technologie, plus de concentration - broché - Michel Le Seac'h, Cal Newport
Le livre de développement personnel : Imperturbable - Développement personnel (Grand format - Broché 2020), de NIR EYAL | Talent Editions
L’association Center for Humane Technology