🔴 7 about... le syndrome du scarabée, Omi.so et Recursive public, plateforme de débat public sur l’IA
Le syndrome du scarabée
1. Le syndrome du scarabée désigne le biais cognitif inconscient qui nous inciterait à privilégier nos semblables. Dans le monde du travail, cela signifie que les dirigeants et managers préfèrent recruter et promouvoir des personnes ayant le même profil qu’eux. (Ah, ces boîtes où tout le monde a fait la même école de commerce…)
2. La source de cette réflexion est une étude menée par Thomas Park, entomologiste à l’Université de Chicago, dans les années 40/50, portant sur la cohabitation de différentes espèces de scarabées. Résultat de l'expérience : l’espèce qui s’avéra dominante, était celle qui mangeait les œufs de l’espèce concurrente, et favorisait ainsi sa propre espèce.
3. Heureusement nous n’en sommes pas à dévorer les bébés de nos concurrents ! Toutefois, cette étude a servi de base aux recherches de George Akerlof (Prix Nobel d’économie 2001) et de Pascal Michaillat (professeur d’économie) postulant que, comme les scarabées, les humains favorisent leurs semblables selon des principes d’homophilie (“ tendance à préférer entretenir des relations avec des personnes qui nous ressemblent” - Claire Bidart).
4. Dans le monde de l’entreprise, cela implique que la performance est loin d’être le seul critère de recrutement ou de promotion. Sans même en avoir conscience, les dirigeants préfèreront des personnes similaires à eux, en termes de sexe, d’âge, de diplôme, de milieu social, d’opinions, de loisirs… et rejeteront les autres.
(...) Dès lors qu'on effectue des promotions au sein d'une organisation hiérarchisée, les managers et autres dirigeants ont tendance non seulement à favoriser la similarité, mais aussi à rejeter l'hétérogénéité.
George Akerlof et Pascal Michaillat
5. Ce biais cognitif a des conséquences individuelles. Au-delà de vos performances et de vos capacités, votre carrière sera impactée par votre appartenance ou votre défaut d’appartenance au groupe dominant et dirigeant. Encore aujourd’hui, les premiers concernés sont les femmes, les séniors, les profils issus de la diversité… d’où ces éternels inégalités salariales et “plafonds de verre”.
6. Au niveau de l’organisation elle-même, une trop forte homogénéité des profils entraîne un manque de créativité, d’innovation et d’ouverture, et fait fuir les talents non reconnus… La sclérose guette lorsqu’il n’y a plus de débats et que tout le monde est d’accord sur tout, tout le temps.
7. Difficile bien sûr de lutter contre un biais inconscient… Peut-être faut-il faire l’effort de considérer ce qui nous manque - compétences, qualités, potentiels - et penser davantage en termes de complémentarité.
La leçon à retenir
Ma meilleure expérience en entreprise a été lorsque, dans un secteur entièrement nouveau, l’équipe constituée ne comportait pas un seul profil identique. La richesse de ces formations, expériences et points de vue différents était extraordinaire et passionnante. C’est malheureusement beaucoup trop rare !
Pour aller plus loin
L’article scientifique de Thomas Park - Interspecies Competition in Populations of Trilobium confusum Duval and Trilobium castaneum Herbst
L’article scientifique de George Akerlof et Pascal Michaillat - Beetles: Biased Promotions and Persistence of False Belief by George Akerlof, Pascal Michaillat
Omi.so
1. Omi.so est une application Web de modélisation d’objets, permettant d’obtenir facilement des photos et des vidéos 3D.
2. Ces visuels 3D ultra réalistes peuvent être utilisés pour renouveler les contenus destinés aux réseaux sociaux (reels, Ads, stories, vidéos…). Les sites d’e-commerce peuvent également les intégrer dans leurs présentations, sans avoir à organiser de prises de vue spécifiques.
3. Le fonctionnement est assez simple : le client envoie l’objet lui-même (eh oui, “en physique”) ou une série de photos 2D, aux équipes de Omni.so pour qu’elles le modélisent.
4. Les visuels 3D obtenus peuvent être mis en scène en utilisant les templates, fonds, accessoires, textures… proposés par Omi. Vous n’avez pas besoin de compétences techniques pour générer rapidement de nouvelles images “pro”.
5. Autre fonctionnalité : la visionneuse 360° qui permet de “manipuler” virtuellement un objet dans tous les sens. Le client peut faire son choix (presque) comme dans la vie réelle ce qui limite les retours pour les sites d’e-commerce.
6. Après une première levée de fonds (750 000 euros), cette startup française a annoncé en juin 2022 un second tour de table de 6 millions d’euros auprès notamment du fonds anglais Dawn Capital, spécialisé dans les logiciels B2B en Europe. L’objectif principal est de se développer en Europe du Sud (Portugal, Espagne et Italie) et au Royaume-Uni.
7. Omi.so s’inscrit dans des marchés à fort potentiel. Ainsi, “la taille du marché de la réalité augmentée devrait passer de 29,84 milliards USD en 2023 à 174,47 milliards USD d'ici 2028…” (source Mordor Intelligence). Par ailleurs, selon une étude de Goldman Sachs, le secteur de la création de contenu pourrait approcher le demi-milliard de dollars d'ici 2027.
La leçon à retenir
Omi.so s’auto-proclame “le Canva de la 3D”. On ne peut que leur souhaiter le même succès.
Pour aller plus loin
The Creator Economy Could Approach Half-a-Trillion Dollars by 2027
Marché de la réalité augmentée - AR - Taille, prévisions, croissance et tendances
Le Panier - Omi.so : 8 conseils e-commerce et social media pour booster sa conversion
Recursive public, plateforme de débat public sur l’AI
1. Recursive Public est une organisation qui recense les sujets de consensus et de désaccord liés à l’Intelligence Artificielle. Son objectif est de refléter en temps réel le point de vue des professionnels de l’IA, des décideurs politiques… et de toute personne concernée par ce thème.
2. Recursive Public est une initiative commune émanant de deux organisations :
vTaiwan (pour virtual Taïwan) : une plateforme de réflexion (taïwanaise comme son nom l’indique) créée en 2014 lors du mouvement Tournesol des étudiants
Chatham House : un think tank de relations internationales créé en 1920, notamment par Woodrow Wilson, Président des Etats-Unis
3. Recursive Public se veut un espace de discussion ouvert, démocratique et transparent, où l’on peut délibérer sur les enjeux sociaux et humains de l’Intelligence Artificielle.
4. Pour recueillir les opinions et construire un consensus, Recursive Public s’appuie sur la plateforme Pol.is, développée par vTaïwan. Le processus se déroule en trois étapes :
Susciter des débats en ligne pour identifier les sujets intéressant le plus la communauté
Rendre publiques les délibérations et les opinions liées à ces sujets
Présenter les positions résultant de ces délibérations
Et, pour tout cela, la plateforme Pol.is utilise de… l’Intelligence Artificielle. La boucle est bouclée.
5. En mai 2023, Open AI a accordé à cette organisation une subvention de 100 000 dollars dans le cadre de son programme Democratic Inputs, destiné à encourager un processus démocratique autour de l’Intelligence artificielle.
“By “democratic process,” we mean a process in which a broadly representative group of people (A) exchange opinions, engage in deliberative discussions (B) and ultimately decide on an outcome via a transparent decision making process (C).” - Open AI
6. D’autres acteurs de l’AI se mobilisent - officiellement en tout cas - pour favoriser la consultation publique sur les enjeux de l’IA.
Meta organise ses propres consultations via ses Community Forums inaugurés en novembre 2022.
Anthropic, concurrent d’Open Ai et partenaire de Google, a proposé une Constitution Collective de l’IA (Collective Constitutional AI) rédigée par mille citoyens américains.
Deep Mind, filiale AI de Google, cherche également à développer la participation publique quant aux enjeux de l’IA.
7. Si le volet technique de l’Intelligence Artificielle est une boîte noire dont la compréhension est réservée à un tout petit cercle d’initiés, les répercussions de l’IA nous concernent tous. La réflexion et la concertation ont cruellement fait défaut lors de l’adoption massive des réseaux sociaux dans les années 2010. Les likes nous paraissaient alors inoffensifs : on sait maintenant qu’il n’en est rien.
La leçon à retenir
Soyons optimistes : il semblerait que les Large Modèle de Langage favorisent les conversations modérées et la recherche de consensus. Croisons les doigts !
Pour aller plus loin
Governance of super Intelligence, Open AI
Bringing People Together to Inform Decision-Making on Generative AI, Nick Clegg, responsable des Affaires publiques de Meta et ancien ministre britannique.
The simple but ingenious system Taiwan uses to crowdsource its laws, MIT