7 about... l'effet d'ancrage, les licornes à impact et l'imagerie satellite
L’effet d’ancrage
1. L’effet d’ancrage (anchoring) est un biais cognitif par lequel notre opinion se forge à partir des informations que nous avons reçues en premier. Il nous est ensuite difficile de prendre en compte d’autres informations et d’ajuster nos décisions en conséquence.
“On n’a pas deux fois l’occasion de faire une bonne première occasion.”
2. Il s’agit d’un des raccourcis empruntés par notre cerveau pour évaluer une situation qu’il ne connaît pas et prendre une décision rapidement. Ce biais cognitif peut nous jouer des tours si nous ne parvenons pas à prendre du recul et à considérer une situation dans toute sa complexité.
3. L’effet d’ancrage peut être utilisé comme technique de négociation : vous fixez un point de départ élevé, pour finalement réduire votre demande, qui ainsi deviendra acceptable.
Quelques exemples :
C’est ce biais qui est utilisé lors d'opérations de promotion : quoi de plus séduisant qu’un prix barré, surtout si la différence entre le prix de départ et le prix réduit est importante ? Quel que soit le prix réduit, vous aurez l’impression d’avoir fait une bonne affaire, même si le prix final est supérieur à ce que vous vouliez mettre.
Idem si vous laissez entendre à votre interlocuteur que vous allez lui demander un effort colossal, et que vous ne lui demandez qu’une minuscule faveur, qu’il sera ainsi beaucoup plus enclin à vous accorder.
4. Ce biais cognitif a été théorisé pour la première fois en 1974 par les pionniers de l’économie comportementale et de la psychologie cognitive - Amos Tversky et Daniel Kahneman (prix Nobel d'économie 2002) - dans leur article : “Judgment under Uncertainty: Heuristics and Biases”.
5. L’effet d’ancrage est puissant, surtout lorsqu’il s’agit de chiffres. D’après une série d’expériences menées par Chris Janiszewski et Dan Uy (Université de Floride), plus un ancrage chiffré est précis, plus l’ajustement sera de faible ampleur.
Un exemple : si vous vendez votre maison 348 500 euros, vos acheteurs potentiels proposeront un prix négocié plus élevé que si votre prix annoncé est 350 000 euros. Sans que vous vous en rendiez compte, vous avez compris que l’unité de négociation “acceptable” était la centaine d’euros, et non la dizaine de milliers d’euros.
L’expérience a été déclinée dans de nombreux domaines sur des ordres de grandeur différents : même résultat.
6. La puissance de cet effet d’ancrage peut aussi nous servir. Lorsqu’une négociation s’ouvre, le premier à donner un chiffre fixe l’ancrage, le point de départ de la discussion. Au moment de demander - au hasard - une augmentation, soyez le premier à donner un chiffre, le plus précis possible…
7. Dans le cas où vous “recevez” le premier chiffre. Soit il vous convient et négociez alors en ayant bien en tête les biais d’ancrage. Mais si ce chiffre vous paraît extrême, votre interlocuteur est probablement en train de vous “ancrer”. Ne cherchez même pas à discuter et mettez un terme à l’échange.
Identifier cet effet d’ancrage peut être utile quelque soit votre domaine, comme le démontre Chris Voss, l’auteur du passionnant Never Split the difference, et surtout ancien négociateur du FBI.
La leçon à retenir
Faire la moitié du chemin chacun, ce n’est pas négocier mais abdiquer. Négocier n’est pas inné, ça s’apprend… L’effet d’ancrage est la leçon N°1.
Pour aller plus loin
Pricing and the brain: Why things cost $19.95 – Association for Psychological Science – APS
Precision of the Anchor Influences the Amount of Adjustment
Les licornes à impact
Nous avons déjà évoqué les licornes et même les gigacornes. Et si nous nous intéressions maintenant aux licornes à impact ?
1. Les licornes à impact sont ces entreprises de moins de 20 ans, valorisées à plus d’un milliard de dollars, dont la mission est l’un des 17 objectifs de développement durables identifiés par les Nations Unies.
2. Le monde compte 146 licornes à impact dont 52 apparues en 2021, pour une valeur cumulée record de 1 600 milliards de dollars (multipliée par 12 depuis 2017).
3. Avec 34 licornes à impact, l’Europe se place devant l'Asie (20) mais loin derrière les Etats-Unis (90).
4. Quelques exemples :
Etats-Unis :
Chine : BYD (Build your dreams), le Tesla chinois, ex-producteur de batterie devenu constructeur de véhicules électriques
France : Backmarket, le spécialiste du reconditionnement et de la vente de produits électriques et électroniques d'occasion
5. Des levées de fond record. Les startups à impact ont clairement le vent en poupe auprès des financiers. Sur les trois premiers trimestres de 2021, tous les records de levée de fonds ont été battus avec 39 milliards d'euros, contre "seulement" 16 milliards pour l’ensemble de 2020.
6. L'Europe et les Etats-Unis en tête. Même si les Etats-Unis enregistrent le plus gros volume d’investissement avec 22 milliards de dollars en 2021 (contre 11 milliards en Europe), c’est en Europe que la part des investissements dans des startups à impact est la plus élevée (14 %). Enfin, toujours en Europe, ce secteur représente un gisement d’emplois en forte croissance (146 000 en 2021 contre 40 000 en 2018).
7. Le climat avant tout. Les startups liées à la lutte contre le dérèglement climatique attirent la vaste majorité des investissements, soit plus de 100 milliards de dollars cumulés depuis 2017.
La leçon à retenir
Les licornes à impact attirent les investisseurs et les talents de tous horizons pour sauver le monde. Mais si nous commencions par modifier nos comportements ?
Pour aller plus loin
Eclosion, le premier Startup Studio à impact en France
Le rapport : Dealroom.co - 2021, a record year for Impact Investment
L'imagerie satellite
1. L'imagerie satellite, qu’est-ce que c’est ? Utilisée depuis la fin des années 1950, l’imagerie satellite est une technique de télédétection par satellite artificiel permettant de recueillir et analyser des données géographiques terrestres, notamment sur des espaces difficiles d’accès : Sahara, Himalaya, Corée du Nord…
2. De l’étatique aux entreprises privées. Réservée à l’origine aux États les plus puissants, l’imagerie satellite s’est “démocratisée” grâce au progrès technique et à la réduction des coûts de production. En la seule année 2020, 1 262 satellites ont été placés en orbite par des entreprises privées : les Américains SpaceX, Alphabet, Lockheed Martin, Northrop Grumman et Boeing, et les Européens OneWeb, Airbus, Thales et Arianespace.
3. A quoi sert l’imagerie satellite ? Au-delà de son intérêt en matière de relevés géographiques ou dans nos vies quotidiennes (GPS), l'imagerie satellite a un usage stratégique : il est possible de dresser un état des lieux précis - quasiment en temps réel - d’une zone, de retracer son évolution passée et d’estimer son évolution future. Informations sinon inaccessibles…
Quelques exemples :
le développement du nucléaire militaire nord-coréen
le regroupement des capacités militaires russes à la frontière ukrainienne
les “camps de rééducation” au Xinjiang
4. La commercialisation de l’analyse d’imagerie satellite. Aujourd’hui, l’imagerie satellite est utilisée à des fins commerciales.
Airbus (service OneTasking) propose aux entreprises de commissionner un satellite Airbus pour obtenir une imagerie précise sur un espace donné.
L’entreprise américaine AllSource Analysis est spécialisée dans le secteur de l'énergie et les risques politiques (assurances).
La start-up indienne FarmERP utilise l’imagerie satellite pour prévoir les risques pour les cultures agricoles.
5. Des entreprises privées à l’open source. “Open data, open science, open innovation”.
Afin de promouvoir la formation, l’innovation et la transparence, le programme Copernicus de la
Commission Européenne mobilise les moyens de l’Agence Spatiale Européenne et des Etats membres pour rendre les données géospatiales libres et gratuites pour tous, notamment aux petites entreprises. Contrairement à Google Earth, le logiciel Sentinel-2 développé par la start-up autrichienne EOX avec l’ASE permet d'accéder à une imagerie satellite de haute résolution.
6. L’imagerie satellite et l’Intelligence Artificielle. Face à cette nouvelle abondance de données géospatiales, l’analyse humaine ne suffit plus et de nombreuses entreprises ont recours à l’Intelligence Artificielle et au machine-learning. Ces avancées permettent des analyses - et une prise de décision - plus rapide et exacte, notamment pour la gestion de crise.
Lauréate de la “2020 start-up competition” de l’Agence Spatiale Européenne, la start-up espagnole OrbitalEOS propose ainsi de détecter, quantifier et prévoir l’ampleur des marées noires grâce à une analyse automatisée d’imageries satellites.
Financée par le programme Global Pulse de l’ONU, PulseSatellite utilise également l’Intelligence Artificielle afin d’analyser des données satellites liées aux crises humanitaires.
7. Futur et enjeux. En forte croissance, l’industrie de l’imagerie satellite commerciale est soutenue par trois grandes tendances : le besoin en big data, la multiplication des risques, et la privatisation des activités spatiales. En bref: une industrie évaluée à 3,4 milliards de dollars en 2020, une valeur doublée d’ici 5 ans, et un nombre de satellites en orbite multiplié par 10 d’ici 2031.
La leçon à retenir
De nombreuses voix interrogent l'érosion du monopole de l’Etat sur certaines données sensibles aujourd’hui accessibles à tous, notamment dans les domaines de la sécurité, de la défense et du renseignement.
En savoir plus
Corée du Nord : Thermal Imagery Indicates Activity at Yongbyon Nuclear Reprocessing Facilities)
Chine, camps de rééducation, lumières nocturnes : Part 1: Investigating the Growth of Detention Facilities in Xinjiang Using Nighttime Lighting
Sentinel-2 map - Le projet d’open source européen
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