L’idiotisation du monde
1. L’idiotisation du monde désigne la diminution des capacités de raisonnement dont l’espèce humaine serait victime. Si vous avez l’impression que nous devenons idiots, vous avez raison ! Et ce n’est pas qu’une impression, c’est prouvé scientifiquement. Damned !
2. Le déclin de nos facultés de réflexion est attesté par de nombreuses études dont les programmes PISA et PIAAC de l’OCDE et l’étude Adults Literacy and Lifeskills Survey. Le constat est clair : nos capacités de concentration et de raisonnement, verbal comme numérique, ont diminué. Ainsi, 25 % des adultes des pays développés seraient aujourd’hui incapables de mobiliser une pensée mathématique. Aux États-Unis, ce chiffre grimpe à 35 % (on en a quelques exemples funestes en ce moment…).
3. Comment expliquer cette perte de capacités ? La biologie n’est pas en cause : notre cerveau n’a pas changé. En revanche, notre comportement a évolué : nous sollicitons de moins en moins notre cerveau. En le mobilisant moins, nous avons de plus en plus de mal à nous concentrer. Résultat : nous perdons notre capacité à raisonner, à réfléchir en profondeur, à résoudre des problèmes.
4. Selon ces mêmes études, 2012 aurait marqué l’apogée de nos capacités cognitives puisque, depuis le milieu des années 2010, nous vivons un déclin continu de l’usage de notre intelligence, phénomène qui s'est accéléré pendant la période du Covid.
5. Qui sont les coupables ? Pas les suspects habituels, à savoir l’alcool et les stupéfiants, leur consommation étant en baisse chez les adolescents (source). Le coupable est à chercher dans notre nouveau rapport à l’information :
Le passage d’une information finie à une information infinie, disponible en permanence (inutile de mémoriser)
La consommation de formats courts (inutile de se concentrer)
Des formats de plus en visuels (“prémachés” ?) au détriment de l’écrit (inutile de raisonner)
6. Facteur aggravant : nous consommons de plus en plus d'images et de moins en moins de textes. Seuls 48,5 % des adultes américains déclarent avoir lu un livre dans l’année contre 54,6 %, il y a dix ans (source : National Endowment for the Arts). Même notre usage d’Internet a évolué : nous passons d’un comportement actif (consultation de sites que nous choisissons) à une consommation passive de flux continus d’images. Sommes-nous en train de basculer vers une société post-littéraire ?
7. Cette consommation numérique ininterrompue, faite d’images en boucle et de défilements incessants, génère un phénomène désormais bien connu : le brain rot, littéralement, le “pourrissement du cerveau” ou l’écervelage pour les Québécois. Face à l’ampleur du phénomène, l’Université d’Oxford en a même fait son mot de l’année en 2024.
La leçon à retenir
“Que celle ou celui qui n’est jamais tombé dans le trou spatio-temporel de TikTok ou Youtube, nous jette le premier livre…”
Pour aller plus loin
Les moments cultes de la version vintage “Les chiffres et les lettres” avec Patrice Laffont et Bertrand Renard (Mr Chiffre)
Qu’est ce que l’Intelligence et comment ce terme a évolué ? Oxford English Dictionary (en anglais)
Have Attention Spans Been Declining? - Less Wrong
Why the TikTok era spells trouble for the establishment - Financial Times
Les câbles sous-marins
1. 99 % du trafic de données mondial transitent par des câbles sous-marins. On l’oublie trop souvent, nos échanges “dématérialisés” reposent en réalité sur du matériel bien concret.
2. Dans leur écrasante majorité, ces câbles par lesquels transitent nos prompts IA, nos ordres de bourse, nos designs… ainsi que les ordres militaires classés secret défense, ne font l’objet d’aucune mesure de protection, de réglementation ou de contrôle. Les risques sont pourtant sérieux, du sabotage pur et simple à l'espionnage.
3. Les États-Unis et leurs alliés (si, si…en tout cas à l’heure où j’écris cet article) sont encore dominants dans ce secteur : SubCom (USA) installant 21 % des câbles mondiaux et ASN (France) en installant 41 %. Les fournisseurs de contenu tels que Google, Microsoft, Meta et Amazon possèdent ou louent près de 50 % de la bande passante sous-marine mondiale.
4. Toutefois, dans le cadre des routes de la soie numériques, la Chine espère pouvoir capter 60 % de ce marché, notamment avec son projet de câble reliant la Chine, Singapour, le Pakistan, l’Arabie Saoudite, l'Égypte et la France.
5. En ces temps de tensions géopolitiques, l’absence de protection de ces câbles pose un sérieux problème de sécurité, puisqu’il est relativement facile de les saboter. Les simulations développées par les Taïwanais ont montré combien les conséquences de ces coupures pourraient être dévastatrices.
6. Autre point surprenant : toute nation ayant un accès physique à ces infrastructures peut intercepter les données qui y transitent, sans même avoir de problèmes légaux si elles se trouvent dans les eaux internationales.
7. Les câbles n’étant pas protégés, les données, elles, peuvent l’être par cryptage. Certes… mais cela n'empêche pas de les siphonner et d’espérer les décrypter par la suite, en pariant sur la puissance des futurs ordinateurs quantiques. Il semblerait d’ailleurs que les Américains, les Russes et les Chinois s’en donnent déjà à cœur joie. Pourquoi se priver ?
La leçon à retenir
“Moi, j’vous l’dis, sans être parano (un peu quand même), faut avoir une copie de ses fichiers sur son ordi, ses documents sur papier et des pièces d’or sous le matelas…”